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Conspiracy

Salut les copains.

Bon j'ai relu ce blog et je me suis rendue compte de deux choses:
1- je suis la seule, avec ma maman, à lire ce blog.
2- je fais plein de fautes en anglais mais ma maman ne me le dit pas pour ne pas me vexer et mon audience internationale ne me lit pas, sans doute pour la même raison.

Donc bon, back to the français. 

Aujourd'hui, une fois n'est pas coutume (insert here des sentences toutes faites et non pertinentes), je voulais commenter un peu l'actualité. 

Aux États-Unis d'Amérique Trump, un étudiant proche des milieux d'extrême droite a tué d'autres étudiants. Depuis des jeunes de ce même lycée réagissent et interpellent leurs adultes en disant "plus jamais" et "débrouillez-vous pour faire quelque chose plutot que de prier dans le vide comme d'habitude quand il s'agit d'un tueur blanc pas musulman pas immigré enfin pas trop".

Parmi ceux-ci, un certain David Rogg, un jeune de 17 ans qui voudrait être journaliste et a filmé et interviewé ses petits camarades avec lesquels ils s'était caché lorsque la tuerie se déroulait. En bref, un article du Monde résume comment le témoignage de ce jeune homme, et ses interventions appelant à faire passer des lois sur le contrôle de la vente d'armes ont été détournées, réinterprétées pour mettre en cause la crédibilité de l'interlocuteur. Le jeune Rogg serait un acteur / un envoyé caché de CNN se faisant passer pour un lycéen afin de propager les diatribes bien connues de la gauche libérale bien-pensante. En résumé.

Il y aurait beaucoup de choses à dire, sur cette manière par exemple de décrédibiliser systématiquement le locuteur dans sa personne afin d'éviter d'avoir à argumenter, dans le champ du discours, du bien-fondé ou non de ses propositions politiques, d'éviter de faire en fait de la politique. Sans dégainer tout de suite mon Hannah Arendt de poche, "ce genre de tactique rappelle les beaux jours des régimes à tendance fasciste". Si l'on exagère à peine le trait, ce qui d'ailleurs me paraît désormais difficile à évaluer tant les limites du contour semblent souffrir aujourd'hui d'une extension comparable à la taille sylphide du Président vraiment en très très bonne santé qui exerce aujourd'hui Dieu que cette phrase est longue, cela reviendrait à dire que je ne peux pas vous parler d'actualité parce que, et ce de manière équivalente, j'ai lu le journal et fait des études pour bien le lire quasiment toute ma vie, et qu'un jour voire plusieurs je n'ai pas lu le journal, ce qui évidemment me rend à la fois biaisée par le savoir, et totalement incompétente. 

Que la foule invisible de mes lecteurs posthumes se rassure: je suis bel et bien incompétente, mais cela provient sans doute plus du dérèglement de mon cerveau lié au fait de mettre les doigts dans la prise cosmique qu'à mes études, les pauvres. Et d'une tendance toute féminine, apparement, au sentiment d'imposture. 

Quoiqu'il en soit, hormis les lianes de commentaires à faire sur le régime Trump (de l'eau, du fond de teint, et surtout beaucoup beaucoup d'amour d'exercice d'abrutissement devant Fox cheeseburger à la main), il me semble que cette histoire révèle quelque chose de notre fonctionnement à tous. Vous qui êtes des individus cultivés, ouverts, tolérants, apaisés, et qui êtes ma Maman, comble du comble (pour qui, on ne sait pas), vous vous dites sans doute à la lecture de l'article, une fois de plus, "mais enfin mais ils sont fous". D'ailleurs, vous vous le dites tellement souvent maintenant qu'on oublierait presque ce que ça fait de ne pas avoir de fous furieux qui squattent l'attention collective (à cet égard la présidence Macron semblait un bel intermède avant la dégringolade Wauquiez, si la France importe tout avec 10 ans de retard, merci les gilets jaunes, c'était sympa). 

Mais, et là je vous préviens si vous êtes des fans de Charles Eisenstein vous trouverez tout de suite qu'on est super d'accord lui et moi (ou que je pompe tout), ce n'est pas juste ça. Il y a un problème que j'ai toujours trouvé fondamental dans la politique, dans un sens large, dans l'affirmation de ce que l'on est et la confrontation avec ce que les autres peuvent être, c'est de savoir si on ne contribue pas aussi à créer un monde où il y a les autres, et moi.

La discussion politique, qui cherche entre autres à organiser la collectivité autour d'une histoire acceptable par la plupart, a cela de décevant pour nos contemporains qu'elle semble aujourd'hui:
1- impuissante
2- vaine
3- si polarisée qu'elle ne fait qu'émerger les extrêmes à cause d'internet, du trolling, et toussa.

Effectivement, quiconque a déjà trop trainé dans les milieux militants a connu l'épuisement qu'implique l'investissement dans les discussions polémiques où l'on finit, à force de réaction, par tomber dans deux écueils: l'assimilation de la personne à son discours (et donc la perte de distance et de respect que suppose la vie dans une démocratie pluraliste: je peux trouver que tout ce que tu dis est fondamentalement débile, il n'empêche que je n'ai pas le droit d'induire que tu l'es, et que l'on peut disposer de toi d'une manière ou d'une autre), et l'impossibilité de parvenir à une description, un discours englobant exhaustivement le réel, sans contradiction (oui mais si on fait ça, effet indésirable plus ou moins prévisible, que faire?). Dans l'apprentissage rhétorique des moines du bouddhisme tibétain, on apprend à discourir en incluant, c'est-à-dire que ma réponse à ton argument doit pouvoir réfuter ton argument précédant en l'englobant dans une narration plus large, plus généralement valide. Cela peut paraître un peu déplacé compte tenu des sujets débattus mais l'intérêt est de s'extraire du particularisme pour revenir à ce qui est plus fondamental - à la fois plus large et plus près.

Donc, on parle aujourd'hui facilement de désintérêt, de retrait de la politique, montré par l'abstention, le vote blanc, et l'émergence de gouvernements dirigés par des personnalités aux discours extrêmes un peu partout. Le thème de l'inflammation, un ayurvédiste parlerait d'excès d'Agni (le feu), semble déclinable de multiples manières. Macro, réchauffement, escalade des conflits, investissements en armes, explosion des inégalités, polarisation, constitution de monopoles féodaux qui règneront pour les 5 siècles à venir (vous n'avez pas sauté dans le train au bon moment, moi non plus, on va sérieusement morfler), etc. Micro, stress chronique, épuisement pour pas grand-chose dans des bullshit jobs, endettement massif, disparition des protections publiques, affaiblissement des états, explosion des lifestyle diseases (diabète II, problèmes de maladie mentale sans doute aussi liés à la métaphore dominante de notre temps qui voit l'humain comme un processeur qui doit être en réaction constante, adaptable et flexible par rapport à l'atteinte d'objectifs chiffrés, lesquels sont indiscutables et occultent totalement la dimension qualitative, la notion de valeur de l'action + à la médicalisation de l'époque qui remplace la clérisation dans l'encadrement de la vie humaine*), et encore, je fais le dessin pour une partie du monde, je passe sur la déforestation, la destruction environnementale, le massacre des peuples autochtones dans le Nagaland, la mort des espèces non immédiatement exploitables par l'homme, la dévastation des cycles de l'eau et la fonte des glaciers himalayens, les vies d'esclaves, la brutalité sauvage qui se libère et dont l'affaire Kashoggi paraîtra un si gentil prélude.

Parmi les maladies de l'extrême feu contemporain, il y a cette obsession conspirationniste, cette tentative désespérée de trouver des narrations simples qui expliquent ce monde chaotique, si décevant. La popularité de ces théories en temps de crise n'est pas nouvelle, et participe de la crispation réductionniste qui frappe tant de domaines (qui témoigne de la mentalité de guerre: un problème est perçu - il faut trouver une cause si possible unique - qui devient un ennemi duquel il faut se débarrasser - une fois que ceci est identifié, il n'y a plus qu'à mettre en oeuvre toutes les techniques dont on dispose pour éliminer l'ennemi et le tour est joué, la paix règne). Le réductionnisme touche aussi bien une certaine approche de la médecine (chercher la séquence du gène, la bactérie, l'enzyme à modifier), du débat climatique (baisser le CO2, en omettant absolument tout le reste, et aussi d'où part cette frénésie destructrice qui nous fait passer totalement à côté du contentement d'être en vie), que de la politique (les musulmans, les gays, ou les hommes blancs), et je pense que tout le monde dans son domaine d'activité peut le voir à l'oeuvre.

Je voulais faire toute une gradation pour expliquer pourquoi ça ne sert à rien de simplement balayer d'un coup de main le conspirationnisme en disant que de toute façon c'est bête, ce que des gens bien informés que je connais auraient tendance à faire. En réalité, ces croyances, comme tant d'autres, ont des effets concrets (et bien trop concrets en ce qui concerne les personnes assimilées sans procès à l'ennemi). Surtout, parce qu'il y a une sorte de principe de nécessité à l'oeuvre, ce genre de croyance fait partie de ces mauvaises réponses à de vrais besoins - et il me semble un peu facile de simplement ignorer leurs émetteurs sans retracer un minimum ce qui a contribué à ça. Une fois, dans un trajet en covoiturage, une jeune fille voyageant avec sa mère, un peu désespérée d'ailleurs de ce que racontait sa fille, m'a exposé pendant deux heures tout ce pourquoi les juifs et Israël et Bildenberg contrôlaient le monde et le 11 Septembre était une fraude. Origine modeste, elle portait le voile, pas la mère, donc dans ma tête généralisations sur ces deuxièmes générations abandonnées par la collectivité et influençables par les idéologies du moment. Tout ceci me semblait très logique, à part bien sûr le contenu de son discours. On peut disserter un moment sur les causalités multiples qui la rendaient, elle, à ce moment-là, avec ce discours-là, possible.

On aboutira je pense à deux choses: l'une, c'est que le prix à payer pour l'erreur volontaire (le fait d'imposer un discours comme vrai alors que l'on sait qu'il ne l'est pas) est toujours lourd - par exemple, sacrifier les investissements dans l'éducation sous prétexte de bénéfice statistique immédiat produira nécessairement des effets sur le long terme - le plus marquant étant le cirque Trump, et la possibilité même d'une Betsy de Vos, mais encore, c'est qu'on ne regarde pas la Chine et son système éducatif. Ce qui nous ramène quand même à l'inévitable affrontement des idées politiques, et le vague espoir que la folie du moment génère plus de personnes prêtes à retourner s'impliquer dans le truc plutôt que de tout abandonner pour blogger ou faire des massages. La deuxième, qui revient au même, c'est que le refus de la logique et de la causalité mène forcément à la folie (ou à l'expérience mystique ultime, laquelle en est très proche). Ceci étant, cela est, disait Nagarjuna. Et pourtant, le refus de l'incertitude mène lui aussi à un sentiment illusoire de sécurité qui se construit au dépend d'autrui (à nos propres dépends mais on s'en rend moins compte, de tout ce que l'on perd en s'assurant soi) et crée une adhésion au discours sur le monde (quel qu'il soit) qui ne souffre plus de mise à distance.

J'avais autre chose à dire mais j'ai oublié, je reviendrai éditer tout ceci,

Bisous

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